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Les textes présentés ici sont issus de ma culture biologique. Quelques défauts et autres erreurs grammaticales, syntaxiques et/ou orthographiques peuvent, peut-être (sûrement), avoir subsisté ; que voulez-vous, les produits bio sont rarement parfaits mais n'en ont, paraît-il, que plus de saveur...

...

... et puis on se trouve les excuses qu'on peut.

Merci de votre indulgence.


And, for our English speaking friends, this way please : Jeffw's Inn

(Oh ! And this is a literary blog, by the way)


vendredi 3 septembre 2010

Quatre mois plus tard...



        Ça devient une mauvaise habitude... Bon, reprenons plus sérieusement.
Lançons-nous dans du gros projet : Un roman-feuilleton !... dont voici la quatrième de couverture :

Auguste Lesemeur, bon vivant impénitent, homme à femmes, soiffard devant l'Éternel, roublard et magouilleur, Auguste, le joyeux drille aux mille cordes à son arc – et pas une seule tendue –, à l'amitié en acier trempé et au foie en sursis, oui, lui, cet Auguste là, s'en va t'en quête !
Affublé de son compagnon de mésaventure et de toujours, Paco, le faux sicilien, il s'embarque dans une croisade épique et odysséenne contre la tyrannie des Heures de Fermeture ; une geste extraordinaire à la limite du pas très normal qui les mènera, peut-être, si tout ce passe bien et que le temps le permet, jusqu'au mythique Nemrod (Le-Toujours-Ouvert).

Suivez leur périple improbable au travers des rues du Juvisy des heures indues, par-delà la Nationale 7 !... malgré la terrible prophétie de Tonton Manouch'.
Vous y remonterez le fleuve des stéréotypes à contre-courant.
Vous y rencontrerez les Harpy's et un Némésis professionnel – qui prouve que la noblesse ne peut être qu'un titre et que l'oisiveté est vraiment la mère de tous les vices.
Vous y découvrirez ce qui se trouve au nadir de l'ivresse...
Mais surtout, vous y trouverez les réponses aux deux questions qui ont tracassées l'humanité depuis ses origines : Mais où se trouve le Diable Vau-Vert ? Et pourquoi le Picon-bière ?

Oh, et vous saurez également si le Monde tel qu'on le connaît sera changé, à jamais !


La Geste d'Auguste Lesemeur, votre roman-feuilleton de l'été automne !... et peut-être de l'hiver aussi !

Sponsorisé par Got'Hic!, la seule bière au sang de vierge !


Toutes ressemblances avec des personnages ayant existé, existants ou qui existeront et un vrai Juvisy s/Orge seraient purement fortuites...
ou vraiment la faute à pas d'chance...


Le principe est simple, un épisode par semaine (en principe, c'est pour ça que c'est un principe) et ça durera ce que ça durera et nous verrons bien où tout cela nous mène.

Comme vous m'êtes sympathique, voici déjà les deux premiers épisodes... 



Chapitre I : Rallyement - Épisode 2 -



Comme à son habitude, il arborait, en plus d'un air indolent, le look qu'il avait adopté la première fois qu'il avait vu Indiana Jones, un jean et un t-shirt noir, sous une veste de la même toile de Nîmes, à la multitude de poches d'inépuisables et surprenants contenus. Une échoppe d'un spécialiste du jean jouxtait, à l'époque, le cinéma. Il portait également une robuste paire de boots renforcées, dites de travail, qui n'avaient jamais connu un jour du même nom.
Au premier abord, Auguste inspirait confiance… Mais tout le monde au Rallye savait qu'au deuxième abord, non, si on avait appris quoi que ce soit du premier abord… On le savait capable de vendre sa mère – il l'avait d'ailleurs déjà fait par deux fois dans sa carrière, fait d'autant plus remarquable qu'il était un enfant de l'assistance.

Il se dirigeait automatiquement vers ce coin du comptoir qu'il s'attribuait, et que les autres clients considéraient tacitement comme sa place, quand il s'arrêta court.
- « Bien le bonjour Balthazar, ainsi qu'à l'aimable assemblée…  », dit-il, sans quitter des yeux l'objet de son attention, « … un nouveau ? », s'enquit-il.
Il désignait un jeune homme à la vingtaine fraîche, ayant tous les attributs du philosophe débutant – les cheveux mi-longs, avec effet dans le vent inclus, l'écharpe démesurée, la chemise en soie et la veste en tweed aux coudes protégés de cuir. Il avait même fait l'effort de s'équiper du livre pseudo-intellectuel indispensable, pour toujours greffé, ouvert, dans sa main droite, et de l'air éthéré-pensif de circonstance. En un mot : un étudiant. Comble de l'offense, il occupait pour le moment cette partie du zinc qu'Auguste appelait son deuxième chez lui (ou, tous comptes faits, son premier chez lui). Comble de l'outrage, il y sirotait ce qui ressemblait fort à un latté
- « Ah, oui, autant pour moi. », Balto s'empara d'un torchon pour chasser l'importun, « Allez ouste, du vent le romano ! »
Le garçon, effarouché, s'enfuit et se réfugia à une table située derrière l'un des trois piliers carrelés de la pièce, sans trop comprendre ce qu'il lui était arrivé.
- « Un latté, sérieusement, Balto ?
- Penses-tu, c'est juste un grand-crème, mais dans un verre et avec un nom prétentieux, je peux augmenter le prix de 25%, minimum ! »
Auguste put enfin rejoindre Paco et installer son coude dans le creux du métal qu'il avait érodé à longueur d'années, son père avant lui et le père de son père avant lui... car après tout, un arbre généalogique imaginatif et toujours changeant, au gré des conversations et des circonstances, n'est-il pas le privilège de l'orphelin ?
Les deux amis se saluèrent d'une poignée de main franche et chaleureuse que seuls des hommes ayant traversé l'enfer, vu l'indicible ou bu énormément ensemble pouvaient partager.
Balto, toujours équipé de son torchon, polissait la portion du comptoir qui leur faisait face, attendant patiemment que les effusions s'achèvent.
- « Puis-je intéresser ces gentlemen avec un demi de notre toute nouvelle bière au sang de vierge ?
- J'aime bien quand il nous appelle 'jeanteulmaine', ça fait classe… même si on sent bien qu'il veut nous vendre quelque chose. », observa Paco.
- « Au sang de vierge, vraiment ? », interrogea Auguste, toujours plus pragmatique que son camarade.
- « Et bien, c'est à dire… C'est du sang de porc, évidemment, mais on m'assure que ces cochons n'ont jamais connu le coït, donc techniquement… C'est d'ailleurs ironique, vu que par chez moi nous appelons ça des cochoncetés, mais eux, non… »
Un silence à demi-consterné suivit cette déclaration.
- « C'est une idée de la brasserie pour attirer la clientèle gothique.
- Hum, passons sur l'offre de la bière au boudin ; la mienne sera une belle blonde, tavernier !
- … et comme je ne suis pas jaloux, j'aurai la même »,ajouta Paco, joyeusement.
Le barman, résigné, s'empara de deux verres étincelants et les emplit du liquide convoité.

Fidèles à leur tradition, Auguste et Paco n’échangèrent plus un mot avant que la première gorgée ne fut bue et savourée. Comme ils se connaissaient bien, ils ne parlèrent pas non plus avant que la deuxième ne soit consommée…
- « J'ai de grandes nouvelles, mon bon Paco !
- J'aimerais bien que les gens arrêtent avec mon bon Paco... », grommela l'intéressé.
- « Pardon ?
- J'aimerais bien que les gens arrêtent avec mon bon Paco. », répéta-t-il plus clairement.
- « Si il n'y a rien d'autre pour t'obliger. Votre attention tout le monde », clama Auguste, « Vous connaissez tous mon très cher ami Paco, ici présent ? Paco, dit bonjour à tout le monde. »
Paco fit un petit signe de la main.
- « Paco, donc, aimerait infiniment que l'on arrête de l'appeler mon bon, ça le froisse, et vous ne voudriez pas froisser Paco ?
- Non Auguste... », répondit tout le monde, en traînant des pieds comme des gamins pris en faute.
- « Car quand on froisse Paco, on court le risque d'être froissé soi-même, un nez cassé est si vite arrivé, à bon entendeur, merci. Voilà qui devrait faire l'affaire.
- Merci Auguste.
- Il n'y a pas de quoi mon bon Paco.
- Ben ?! Et toi ?
- Moi, c'est pas pareil. Moi, c'est affectueux. »
Paco poussa un soupir résigné, après tout les plus grandes amitiés étaient bâties de compromis.
- « Et à compromis, chose due. », marmonna Balto en essuyant ses verres, au fond du café.
Il songea soudainement qu'il ne devrait peut-être pas écouter les monologues intérieurs qui ne le regardaient pas, sous peine de gros dangers inattendus, voire mortels, qui pourraient lui tomber sur le coin de la gueule, pour cause de narrateur excédé… Il partit pour la cave, refaire son stock, en sifflotant nerveusement et en faisant très très attention dans l'escalier.
Nos deux compères en profitèrent pour re-remplir leur verre à la pompe, avant de se ré-essayer à leur conversation.
- « Je disais donc, j'ai de grandes nouvelles, Paco. C'est ce soir. C'est ce soir, ou jamais. »


Chapitre I : Rallyement - Épisode 1 -



          Paco avait passé une journée très constructive, assis sur son banc préféré.
Il s'en sentait d'ailleurs moins con pour la peine. La proximité de la bibliothèque municipale lui faisait toujours cet effet.
Ce banc, à l'angle de la place Jean Durix et merveilleusement orienté, avait vu ses plus belles heures, il y prenait régulièrement le soleil et le temps de vivre, souvent avec son meilleur ami, Auguste, devisant sur le monde, la société ou le prix du saindoux, mais pas aujourd'hui.
Il replia sa copie du 'Turfiste Joyeux', se la coinça sous le bras et empocha ses notes couvertes d'équations énigmatiques et de signes cabalistiques, avant de se lever, à regret. Cet endroit de choix était normalement à deux pas, par la rue du Docteur Minot, de son abreuvoir préféré, mais nous étions jeudi, aujourd'hui, c'était travail.
Il partit, donc, pour le bureau.
Il traversa la place du Maréchal Leclerc à petites foulées, continua jusqu'à l'avenue de la République et tourna vers le pont des Chemins-de-Fer, qu'il traversa. C'était son plus long périple de la semaine, qu'il effectuait, religieusement et hebdomadairement, en une grosse demi-heure. Après juste cinq minutes de sa démarche de plaisancier, il arriva en vue du bureau... de tabac-PMU de M'dame Marguerite. Il plaça son seul et unique pari, comme d'habitude, et contempla avec plaisir son ticket et la tache accomplie. Il n'y étancha pas sa soif, pourtant colossale en cette fin d'après-midi – il est bien connu que les joueurs invétérés ne sont pas de bonne compagnie, on ne peut tout simplement pas leur faire confiance. Il s'en alla plutôt voir si son condisciple finissait l'un de ses déjeuners d'affaire tardif au Café de la Gare, de l'autre coté du pont. Comme il n'y était pas, il finit rapidement son verre qu'il avait commandé par reflexe et rejoignit l'avenue d'Estienne d'Orves, qu'il remonta jusqu'en haut, jusqu'au saint des saints, jusqu'au Rallye.

Le Rallye était aux débits de boissons ce que St Pierre de Rome était aux cathédrales, et son cellier, sa chapelle Sixtine. Le Rallye était une symphonie de bon goût, pour ceux qui ont le goût de ces choses là. Le Rallye était un chef-d'œuvre à la gloire vinicole, l'ultime honneur des légions de brasseurs et un panthéon de la torréfaction. Le Rallye était le joyaux d'entre tous les bars. Le Rallye se trouvait être également le café de prédilection d'Auguste Lesemeur et de son compagnon de toujours, Paco – que nous avons déjà rencontré.

La porte vitrée s'ouvrit dans le tintement cristallin d'une petite cloche distinguée, polie jusqu'à la perfection, à en faire pâlir d'envie la galerie des glaces du château de Versailles. Ah, pas de bip-bip électronique et vulgaire ici, ah non, monsieur. Ici, tout était comme il se devait d'être.
- « Z'avez pas vu Auguste ? », demanda Paco, alors qu'il traversait un univers de bois patinés et de carrelage satiné, dans la pénombre calculée de la salle principale, à la cantonade et au patron des lieux plus particulièrement.
- « Il pourrait aussi bien être au diable vauvert que je ne m'en tamponnerais pas plus le coquillard. »
Au Rallye, les habitués laissaient rarement passer de tels commentaires…
- « … En Seine-et-Marne ça ? », suggéra quelqu'un, des alentours de la table de billard..
- « Non, tu penses à Vaux-Le-Vicomte. », corrigea un autre quelqu'un, qui apparemment connaissait le premier quelqu'un...
- Ça m'étonnerait ! Je ne pense JAMAIS à Vaux-Le-Vicomte ! »
Paco se laissa bercer un moment par les inepties des piliers locaux, qui, avec un soupçon d'RTL, composaient le fond sonore du café.
- « ... pff, ce que tu peux être susceptible quand on en vient aux châteaux de la Loire…
- De la Loire ?! Vaux-Le-Vicomte ?!
- Oui... ou du Rhône, j'sais plus... Tu sais, moi, les vins, si c'est pas de Bordeaux…
- Dieu qu'il est con… »
Le reste de la dispute se noya dans La Valise et les délires de son animateur trop souriant – ça s'entendait – à l'encéphalogramme plat – ça s'entendait aussi.
- « Je vois que nous sommes partis d'un mauvais pied... Recommençons : Bonjour Balto.
- C'est Monsieur Balto pour toi, mais c'est mieux... Bonjour Paco. Et non, je ne l'ai pas vu aujourd'hui. »
Balthazar Melchior (Non. Non, ça ne le faisait pas rire), un mélange de Richard Burton jeune et de Carlos vieillissant – le chanteur, pas le terroriste – avec une barbe qui aurait fait envie à un grand amateur de barbe, même les pas terribles, était LE bistrotier exemplaire. Ses clients le savaient et la plupart le respectait par cette raison. Trois d'entre eux avaient même fondé un fan-club… Il était plus connu sous le sobriquet de Balto, par la même logique, us ou tradition, saugrenue et séculaire qui avait fait les réguliers du Balto de Draveil surnommer le patron Ali, Rally. D'aucun expliquait que cela venait de Balthazar ; certaines mauvaises langues racontaient que l'origine en était baltringue. Ces malandrins était généralement priés de finir leurs consommations rapidement et de vider les lieux. Balthazar était l'heureux propriétaire d'un établissement respectable et dépourvu du sens de l'humour, son sens des affaires prenant toute la place. Il ne connaissait que deux lois, celle de l'offre et de la demande et celle du Talion, avec une tendance à l'inflation sur le repaiement ('Alors ça vous fera un œil, deux dents et un doigt...'). Il avait une moralité toute personnelle mais était intransigeant sur la politesse et les bonnes manières... des autres.
- « Monsieur Lesemeur ne nous a pas encore fait l'honneur de son auguste présence, huhuhu… Non ? Lesemeur, auguste ? Personne ?
- Ben c'est pas comme si tu la faisais pas tous les jours... »
Les gens du billard commençaient à s'attirer les regards agacés du maître-barman.
- « Béotiens. »
Sur ces entre-faits, Auguste Lesemeur, la cinquantaine indéterminée, son éternel demi-sourire goguenard aux lèvres et une étincelle dans l'œil, fit son entrée.